La loi du 16 mai 2023 transpose la directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union. Le champ d’application matériel élargit le cadre légal de la directive et s’étend à toute violation du droit national et européen (actions ou omissions).
Par information sur des violations, on entend des informations, y compris des soupçons raisonnables, concernant des violations effectives ou potentielles qui se sont produites ou sont susceptibles de se produire dans l’organisation dans laquelle le lanceur d’alerte travaille ou a travaillé ou dans une autre organisation dans laquelle il est ou a été en contact dans le cadre de son travail, et concernant des tentatives de dissimulation de telles violations.
Canal de signalement interne : obligations pour l’employeur
La loi crée l’obligation, dès l’entrée en vigueur de la loi, de mettre en place des canaux et procédures de signalement interne pour les entités juridiques
- du secteur privé qui doivent impliquer la délégation du personnel. Les entreprises de 50 à 249 salariés ont la possibilité de partager les ressources concernant la réception et le suivi des signalements, et bénéficient d’une disposition transitoire jusqu’au 17 décembre 2023 ;
- du secteur public, à l’exception des communes de moins de 10.000 habitants.
La réception et le suivi des signalements en interne doivent répondre aux critères suivants :
- gestion sécurisée et confidentiel
- désignation en interne d’une personne ou d’un service impartial ou externalisation de ce service
- accès au canal de signalement pour les salariés et autres personnes en contact avec l’entité juridique
- réception de signalements par voie écrite et/ou orale (téléphone, messagerie vocale, rencontre) dans une des trois langues administratives
- communication d’informations claires et facilement accessibles
- garantie d’un retour diligent, y compris en cas de signalement anonyme :
- accusé de réception dans les 7 jours à compter du signalement,
- retour d’informations dans les 3 mois à compter de l’accusé de réception.
- apport d’un remède à la violation signalée.
Autres canaux de signalement
Le lanceur d’alerte peut également signaler une violation de la loi
- par un canal externe : l’article 18 de la loi propose une liste de 22 autorités compétentes.
- par divulgation publique, p.ex. en cas de danger imminent pour l’intérêt public, lorsqu’aucune mesure appropriée n’a été prise par le biais des canaux internes ou externes, ou lorsqu’il existe un risque important de représailles.
La loi prévoit la création d’un Office des signalements sous l’autorité du ministre de la Justice.
Qui peut être lanceur d’alerte ?
Le champ d’application personnel vise
- toute personne travaillant dans le secteur privé ou public, y compris les fonctionnaires, qui a obtenu des informations sur des violations dans un contexte professionnel,
- les travailleurs indépendants,
- les actionnaires et les membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance d’une entreprise, y compris les membres non exécutifs,
- les stagiaires rémunérés ou non rémunérés et les bénévoles,
- les travailleurs ayant des relations de travail atypiques (temps partiel, CDD, intérimaire),
- toute personne travaillant sous la supervision et la direction de contractants, de sous-traitants et de fournisseurs,
- les facilitateurs, les tiers et entités juridiques ayant un lien avec le lanceur d’alerte,
- es anciens salariés et les candidats à un emploi.
Sont exclus les lanceurs d’alerte dont la relation est régie par le secret des relations entre un avocat ou un notaire et son client, par le secret des délibérations judiciaires et par le secret médical.
Protection du lanceur d’alerte
Les auteurs de signalement de violation sont protégés pour autant qu’ils aient
- eu des motifs raisonnables de croire que les informations signalées étaient véridiques au moment du signalement et qu’elles relèvent du champ d’application de la loi,
- effectué un signalement soit interne soit externe ou aient divulgué les informations publiquement.
Seules les informations obtenues dans un contexte professionnel seront traitées.
Le lanceur d’alerte est protégé contre toutes menaces, tentatives ou formes de représailles (suspension, licenciement, rétrogradation, discrimination, etc.). La loi garantit une protection efficace du lanceur d’alerte, notamment un renversement de la charge de la preuve à son profit, une procédure accélérée devant les juridictions compétentes, différents types de recours et une déresponsabilisation partielle.
Sanctions
En cas de non-respect de la loi, des sanctions sont prévues :
- une amende de 1.250 à 25.000 euros à l’encontre des personnes qui exercent des mesures de représailles ou intentent des procédures abusives contre les auteurs de signalement,
- une peine d’emprisonnement de 8 jours à 3 mois et une amende de 1.500 à 50.000 euros à l’encontre du lanceur d’alerte qui a sciemment signalé ou divulgué de fausses informations et qui pourra voir sa responsabilité civile engagée.